La nullité du cautionnement face aux irrégularités de la mention manuscrite : un assouplissement jurisprudentiel bienvenu

Un formalisme strict longtemps imposé pour protéger la caution

Pendant de nombreuses années, la Cour de cassation a fait preuve d’une grande rigueur concernant le formalisme du cautionnement. L’ancien article L341-2 du Code de la consommation imposait en effet à toute personne physique s’engageant comme caution envers un créancier professionnel de faire précéder sa signature d’une mention manuscrite très précise, sous peine de nullité de l’engagement. Cette exigence visait à protéger la caution en s’assurant de son consentement éclairé.

La jurisprudence appliquait ce texte de manière particulièrement stricte :

  • Toute omission ou ajout par rapport à la formule légale entraînait la nullité
  • La mention devait être écrite en entier par la caution elle-même
  • Même une mention conforme mais dactylographiée était sanctionnée

Cette rigueur excessive conduisait fréquemment à l’annulation de cautionnements pour des irrégularités mineures, au détriment des créanciers.

Un revirement jurisprudentiel bienvenu vers plus de souplesse

Par un arrêt du 9 novembre 2022, la Chambre commerciale de la Cour de cassation opère un revirement bienvenu. Elle juge désormais que les omissions, ajouts ou absences dans l’écriture de la mention prescrite n’entraînent la nullité du cautionnement que s’ils sont de nature à affecter le sens et la portée de l’engagement de la caution.

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Cette nouvelle approche permet de :

  • Préserver l’objectif de protection de la caution
  • Éviter les annulations pour des irrégularités purement formelles
  • Assurer un meilleur équilibre entre les intérêts des parties

Elle s’inscrit dans un mouvement plus large d’assouplissement du formalisme du cautionnement, notamment avec la réforme du droit des sûretés de 2021.

Une solution en phase avec l’évolution législative récente

L’ordonnance du 15 septembre 2021 réformant le droit des sûretés a en effet considérablement assoupli les exigences formelles du cautionnement :

  • Suppression de la mention manuscrite obligatoire
  • Remplacement par une mention d’avertissement plus souple
  • Possibilité de rédiger cette mention par tout moyen

La solution de la Cour de cassation s’inscrit donc parfaitement dans cette évolution législative, en permettant de valider des cautionnements antérieurs à la réforme malgré des irrégularités mineures.

Un équilibre subtil entre protection de la caution et sécurité juridique

Cette nouvelle jurisprudence réalise un équilibre subtil entre des impératifs contradictoires :

  • Protéger la caution contre des engagements irréfléchis
  • Assurer la sécurité juridique des transactions
  • Éviter un formalisme excessif source d’insécurité

Elle permet de sanctionner les irrégularités substantielles tout en validant les cautionnements comportant des erreurs vénielles. Le juge devra désormais apprécier in concreto si les irrégularités constatées ont réellement affecté le consentement de la caution.

Des interrogations persistantes sur l’application de cette nouvelle approche

Si le principe posé par la Cour de cassation est clair, son application concrète soulève encore des interrogations :

  • Quels critères pour apprécier l’altération du sens de l’engagement ?
  • Quelle sera l’étendue du contrôle de la Cour de cassation ?
  • Comment articuler cette jurisprudence avec la réforme de 2021 ?
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Il faudra sans doute plusieurs décisions pour préciser les contours exacts de cette nouvelle approche jurisprudentielle.

Conclusion : un pas important vers un formalisme plus équilibré

Cette décision marque une évolution importante de la jurisprudence vers un formalisme plus équilibré du cautionnement. Elle permet de préserver l’essentiel – la protection du consentement de la caution – tout en évitant les excès d’un formalisme trop rigide. Elle s’inscrit dans un mouvement plus large de modernisation du droit des sûretés, conciliant efficacité économique et protection des parties faibles.

Résumé : La Cour de cassation assouplit sa jurisprudence sur le formalisme du cautionnement, en jugeant que les irrégularités de la mention manuscrite n’entraînent la nullité que si elles altèrent le sens de l’engagement. Une évolution bienvenue, en phase avec la réforme récente du droit des sûretés.